« Ni dieux, ni maîtres » » criaient les anarchistes,
Il n’y a plus beaucoup d’anarchiste en politique et pourtant leur slogan semble avoir bien imprégné les mentalités contemporaines.
Et aujourd’hui en effet, on a chassé Dieu de nos villes et de nos vies et le chassant tous ceux qui avaient une autorité, tous les maîtres ont eux aussi été remis en cause et petit à petit chassé : dehors les maîtres, dehors les pères et les mères, dehors les instituteurs, dehors les curés, en fait dehors tout ceux qui incarnent l’autorité. Je suis mon seul maître, je ne veux dépendre de personne, semble être devenu le credo de notre modernité.
On a chassé Dieu.
On a chassé les maîtres et on se retrouve dans une société sans maîtres, enfin libre !!
Libres ? Pas tant que ça, parce que depuis que nous avons congédié les anciens maitres (et je ne suis pas certain que notre monde s’en porte mieux) on voit fleurir une tripotée de nouveaux maîtres : les influenceurs, les coaches, les gourous de tous poils….
Notre monde a besoin de maitres
Or, je crois que notre monde a besoin de retrouver des maîtres, pas n’importe lesquels, de bons maîtres, mais c’est quoi un bon maître ?
Cette question, il faut la poser à celui seul qui est bon.
Il faut la poser à celui qui a l’autorité de qui découle toute autorité.
Il faut la poser au seul maître, modèle de tous les maîtres.
À Jésus dans l’Évangile
Si vous voulez être de bons pères, de bonnes mères, de bons enseignants, si vous voulez exercer l’autorité qui fait grandir, faites vous disciples de l’unique maître : Jésus
Et il nous dresse dans l’évangile de ce jour le portrait du bon maître « Le disciple n’est pas au-dessus du maître ; mais une fois bien formé, chacun sera comme son maître. »
Le bon maître, c’est celui qui nous apprend trois choses, il nous apprend à bien voir, à bien parler et à bien agir.
Bien voir
Bien voir : « Enlève d’abord la poutre de ton œil ; alors tu verras clair » pour vérifier qu’on voit bien, on va chez l’ophtalmo, et il vous assoit sur une chaise à distance respectable du tableau et il vous fait lire de loin : « Qu’est-ce que vous voyez ? » Et vous : MRTVFUENCXOZD, « ben, vous avez 10/10 !! Bravo ! »
Mais le véritable aveuglement, il n’est pas sur l’extérieur que je ne vois pas, le véritable aveuglement, c’est sur moi, c’est sur moi que je suis aveugle, je ne suis pas lucide sur moi, au fond, je ne me connais pas. Le bon maître, c’est celui qui nous apprend à nous connaître, à y voir clair en nous, dans notre âme. Tant que tu n’y verras pas clair en toi, ne va pas donner des leçons à ton frère, c’est l’histoire des deux aveugles ou de la poutre et de la paille. Enlève la poutre pour y voir clair en toi d’abord. Ce travail, car c’est un travail de notre part l’Église l’appel l’examen de conscience (dans la tradition du Carmel) ou la relecture (dans la tradition ignacienne) , habituellement, on le cantonne aux quelques minutes avant la confession et c’est donc teinté d’une pénibilité et d’une culpabilité qui nous fait détester cet exercice spirituel. Or l’examen de conscience, c’est un exercice pour apprendre à se connaître, pour affiner son âme, pour enlever la poutre et toutes les petites échardes qu’il y avait aussi sur la poutre.
Faites votre examen de conscience tous les jours, prenez quelques minutes au milieu du jour ou avant de vous coucher en sachant que le premier acteur de cet examen, c’est l’Esprit saint, la lumière de l’Esprit saint qui nous éclaire pour voir la poutre et qui nous pousse ensuite vers la confession en nous disant « frère, laisse moi enlever la poutre qui est dans ton œil »
Bien parler
Le bon maître m’apprend à bien voir d’abord, à bien parler ensuite : « Car ce que dit la bouche, c’est ce qui déborde du cœur. » Et là non plus il ne s’agit pas d’une séance d’orthophonie où il s’agirait de corriger ma diction pour bien prononcer les mots, bien dire les choses. Le bon maître lui, ne m’apprend pas tant à bien dire qu’à dire le bien.
Son travail n’est pas celui des lèvres, mais celui du cœur.
Si tu veux lutter contre tous ces péchés des lèvres : la médisance, le mensonge, la calomnie, le jugement, la critique, la flagornerie… Tu peux bien sûr appliquer ce précepte « si tu ne peux louer tais-toi ! » C’est déjà un bien que de ne pas dire le mal, mais tu sens bien que tu ne peux pas passer toute ta vie en silence, dans ce cas, le silence est préventif. Mais nous ne sommes pas appelés au silence, mais à la bénédiction, à dire le bien.
Alors le bon maître nous enseigne à prendre soin de notre cœur, à remplir notre cœur de bonnes choses et la meilleure qui soit vous la trouvez à la messe : la parole de Dieu et le pain de vie. Remplissez-vous de la parole de Dieu. J’ai vu une petite vidéo inspirante pour votre carême (qui approche dangereusement). Remplacez votre téléphone par votre bible et on voyait un homme dans toutes les situations de la journée où habituellement, il a son téléphone en main prendre sa bible : au réveil premier reflex ouvrir sa bible, à la cantine : une fourchette à la main et dans l’autre sa bible, marchant dans la rue au lieu de son téléphone en main, sa bible ouverte, dans le métro les yeux fixés sur la bible, avant de s’endormir au lieu de scroller : un dernier regard sur le verbe de Dieu…. « Car ce que dit la bouche, c’est ce qui déborde du cœur. » Prenez soin de ce dont vous remplissez votre cœur, car une fois qu’il est plein, il déborde, imaginez qu’il soit plein des Paroles entendues ce jour à la messe, écoutez le déborder : « Qu’il est bon de rendre grâce au Seigneur » et au lieu de paroles de jugement vos paroles seront des paroles de bénédiction
« Ainsi, mes frères bien-aimés, soyez fermes, soyez inébranlables » et au lieu de parole d’abattement vos paroles seront des paroles d’encouragement.
Bien agir
Bien voir, bien parler, pour Bien agir, pour porter de bons fruits : « Un bon arbre ne donne pas de fruit pourri ;
jamais non plus un arbre qui pourrit ne donne de bon fruit »
Le but du bon maître, c’est d’unifier notre vie, de permettre progressivement d’aligner ce que je crois, ce que je dis et ce que je fais. Cette œuvre d’éducation, elle demande du temps, le temps de la croissance « Le juste grandira comme un palmier, il poussera comme un cèdre du Liban ; Planté dans les parvis du Seigneur, il grandira dans la maison de notre Dieu. » C’est l’œuvre de ceux qui ont autorité sur nous, de ces bons maîtres que le Seigneur nous a donnés, nos parents, nos éducateurs, nos chefs, nos pasteurs, rendez grâce au Seigneur pour chacun d’eux.
Et pourtant, nous savons d’expérience que nos maîtres sont tous déficients, qu’aucun d’eux n’a été parfait avec nous, parce qu’il n’y a qu’un seul bon maître.
Parce que nous vérifions la bonté de nos maîtres de la terre, à leur obéissance à notre maître du ciel
Car nous n’avons qu’un seul maître
Et notre maître, c’est Dieu !
Abbé Simon d’Artigue