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Le secret de la joie – Malheur à moi… homélie 5 dimanche du temps ordinaire B

Le secret de la joie – Malheur à moi… homélie 5 dimanche du temps ordinaire B

Que se serait-il passé si personne ne m’avait annoncé l’Évangile ? Eh bien, je ne serai pas là ! Si je suis là ce matin, c’est parce que quelqu’un m’a annoncé l’Évangile. Pour un grand nombre, ce sont nos parents, mais ce peut être aussi nos catéchistes, un ami qui m’a conduit au Christ, une lecture que sais-je ? Mais il y a quelqu’un qui m’a annoncé l’Évangile. Quelqu’un pour qui cet Évangile était important, premier, brûlant, vital même ! Quelqu’un pour qui cet Évangile devait être annoncé et nous l’avons entendu et nous y avons cru et nous sommes là ce matin.

Mais que se passerait-il si nous arrêtions d’annoncer l’Évangile ? Cette église se viderait, immanquablement, elle se viderait et la voix du Christ se tairait ; cette cathédrale se viderait et elle deviendrait un musée, un beau musée, qu’on visite, mais elle serait vide, à moins qu’on décide de la raser.

Qu’est-ce qui se passe si je n’annonce pas l’Évangile : on ferme, on ferme l’église. L’Église ne grandit que parce que l’Évangile est annoncé, prêché, parce que c’est lui qui change les cœurs, lui pas nous, il s’agit d’annoncer l’Évangile parce qu’il m’a été annoncé, si personne ne me l’avait annoncé, je ne serai pas là.

Parce qu’il faut bien regarder les choses en face, notre Eglise de France ne grandit pas, elle se rabougrit, elle se meurt, elle se vide, lentement. Alors bien sur, nous pouvons nous faire illusion en nous disant que nous sommes 5 ou 600 ce matin dans cette église, qu’il y a 60 catéchumènes adultes cette année, oui, mais il y en a 25000 dehors!

Et pourquoi est ce que notre Église se meurt ? Parce que nous n’annonçons plus l’Evangile.

Parce que nous avons décidé de ne plus annoncer l’Évangile.

Nous continuons à faire ce que nous faisions depuis des années sans rien changer.

Parce que nous avons décidé de continuer nos activités sans annoncer l’Évangile,

Parce que nous continuons à faire le catéchisme sans annoncer l’Évangile,

À préparer au mariage, au baptême sans annoncer l’Évangile,

À animer la messe sans annoncer l’Évangile,

À prier ensemble sans annoncer l’Évangile,

À organiser des concerts sans annoncer l’Évangile,

À nous réunir entre amis sans annoncer l’Évangile,

À passer nos journées sans annoncer l’Évangile,

À vivre sans annoncer l’Évangile

Et le pire, à prêcher sans annoncer l’Évangile.

Nous pouvons multiplier les activités, fussent-elles estampillées catholiques, vécues dans une église, sans annoncer l’Évangile.

Alors « Malheur à moi si je n’annonce pas l’Évangile ! »

Ce n’est pas une malédiction que saint Paul nous lance, c’est un drame pour lui, et une tristesse pour nous.
C’est donc une question de bonheur ou de malheur dont il s’agit ce matin, c’est peut-être même le secret du bonheur que nous livre saint Paul. La rencontre qu’il a faite a changé sa vie et il brûle de la partager.

Et la première question que nous avons à nous poser ce matin : sommes-nous si certain que l’Évangile soit notre joie ? Sommes-nous si certain qu’il a transformé notre vie et qu’il peut transformer la vie de celui à qui je vais l’annoncer ? La rencontre avec Jésus est elle brûlante ? Transformante pour moi ? Si elle l’est, alors « malheur à moi si je n’annonce pas l’évangile »

Mais là, surgissent des dizaines d’objections sur cette annonce de l’Évangile :
– annoncer l’Évangile ? Mais non, ça, c’est le boulot du père Simon, il y a des professionnels de l’évangélisation ceux qui ont reçu une formation pour ça, ceux qui ont reçu l’Esprit Saint en abondance. Non! c’est la mission de toute l’Église, de tous baptisés, car tous nous avons reçu cet Esprit Saint abondamment.
– ce n’est plus de mon âge ! Mais il n’y a pas d’âge pour annoncer l’Evangile, c’est même ça qui nous maintient jeune, cette audace et au contraire, c’est la honte ou la peur d’annoncer qui ride le cœur.
– mais est-ce que ce ne serait pas du prosélytisme ? Paul n’a pas dit malheur à moi si je n’impose pas l’Évangile, il a dit si je n’annonce pas l’Évangile. Non pas imposer, mais annoncer.
– il y a mille manières d’annoncer l’Évangile, on imagine trop vite qu’annoncer l’Évangile, c’est partir en mission, faire du porte-à-porte, sortir dans les rues pour distribuer l’Évangile, bien entendu que ce peut être fait de cette manière-là, mais ça peut être fait de mille autres manières.
Vous connaissez cette phrase que l’on prête à saint François d’Assise, « Prêchez toujours l’Évangile, et, si c’est nécessaire aussi par les paroles. »
En fait il y a autant de manières d’annoncer l’Évangile qu’il y a de cœurs embrasés par l’amour de Dieu, mille charismes et un seul modèle celui de Jésus dans l’Evangile, d’ailleurs au fond,  il n’y a jamais qu’un seul modèle Jésus.
Alors comment faire pour annoncer l’Évangile ? Le contempler et l’imiter, faire comme lui.

Comme Jésus qui prie

La première chose que fait Jésus avant d’annoncer l’Évangile : c’est de prier, comme une préparation, ce contact intime avec son Père, il ne transmet que ce qu’il reçoit. De la même manière nous ne pouvons annoncer l’Évangile que si nous recevons l’Evangile, si nous en vivons, et cela se passe d’abord dans la prière, dans ce cœur à cœur quotidien (c’est pour ca que chaque lundi de ce carême nous vous proposons une école d’oraison, une école pour apprendre à prier). Impossible de parler de Jésus si je n’ai pas commencé par longuement parler à Jésus et plus encore si je ne l’ai pas écouté, si je n’ai pas nourri mon amour pour lui, si je ne l’ai pas laissé remplir mon cœur, jusqu’à ce qu’il déborde de cet amour.

Comme Jésus qui s’approche

Annoncer l’Évangile ça ne peut pas se faire d’une chaire, ça ne peut pas se faire de loin, ça demande une proximité, ça demande de se voir, de se connaître, d’être proche (et c’est pour cela que pendant ce carême, nous vous invitons à vous faire proche, en vous mettant en binôme.). Pour chacun de nous, annoncer l’Évangile, c’est comme dit Saint Paul, « se faire tout à tous », ce peut être en invitant vos amis pour un temps de prière chez vous, pour partager l’Evangile ensemble. Cette proximité qui est l’autre nom de l’amitié, qui est le socle solide et irremplaçable de l’annonce de l’Évangile.

Comme Jésus qui guérit

Annoncer l’Évangile, c’est d’abord prendre soin de mon frère, être attentif à lui, aimer avec les mains, c’est ça guérir

Comme Jésus qui expulse les démons

Annoncer l’Évangile, c’est aussi combattre et expulser ces démons, le mal, le mal qui défigure, le mal qui ronge notre monde : l’exclusion, l’indifférence, la violence.

Comme Jésus qui proclame l’Évangile

Car c’est indispensable de commencer par faire du bien, nourrir les corps avant de nourrir les cœurs, prendre soin des blessures avant de prendre soin des âmes, servir humblement, et ce peut être long, car c’est long de nourrir et réparer ce qui est abimé. Mais la meilleure chose que nous ayons à offrir n’est ce pas Jésus-Christ ? Les repas Tarcissius vont reprendre le premier dimanche de carême et nous allons accueillir ces amis, ces personnes à la rue pour leur offrir un repas, notre amitié, mais n’avons nous que cela à leur offrir ? Si nous n’avions que cela en quoi est ce que nous nous distinguerions des restos du cœur ou du secours populaire ?
N’avons nous pas le désir au cœur que ces amis que nous invitons à partager un repas nous demande : « Mais pourquoi est ce que tu fais tout cela ? » et nous de répondre comme Paul « à cause de l’Évangile ». Nous devons dire pourquoi est ce que nous faisons cela, au nom de qui nous le faisons, au nom de Jésus-Christ Sauveur, de Jésus-Christ qui m’a sauvé et qui te sauve. Car ce n’est pas nous qui changeons une vie, c’est le Christ qui est ma force, c’est d’être avec lui qui est la source de ma joie, c’est l’annonce de son Évangile qui a changé ma vie.

Paul comme Jésus ont annoncé l’Évangile et de cette annonce l’Église a grandi, ce sont eux que nous devons prendre comme modèle.

L’annonce de l’Évangile, c’est un baromètre, le baromètre de notre amour pour le Christ : plus je l’aime, plus j’ai le désir de l’annoncer, plus je l’aime et plus ça se voit.

Alors je vous en supplie pour la joie de Dieu, pour la joie du monde, pour notre joie, annonçons l’Évangile, ne retenons pas cet Évangile, ce trésor que nous avons reçu.

Cette année choisissez d’annoncer l’Évangile à une personne une seule personne de votre entourage, de vos amis.

Parce que « malheur à moi si je n’annonce pas l’Évangile », c’est vrai!
Mais si je l’annonce, que se passe-t-il ?
Si j’annonce l’Évangile, c’est mon bonheur qui grandit ; 

le mien, celui de mon frère qui découvre l’Évangile, l’Évangile qui change une vie, 

la joie de l’Église d’accueillir de nouveaux enfants, 

la joie du ciel, la joie de Dieu.

Il est là le secret de la joie : annoncer l’Évangile !

Abbé Simon d’Artigue