Close

Chercher Dieu – Homélie Epiphanie 2018

Les rois-mages cherchent Dieu. Les hommes cherchent Dieu, depuis toujours ils cherchent Dieu, ils le cherchent partout, ils le cherchent dans la nature, ils le cherchent dans les astres, ils le cherchent dans les livres, ils creusent, ils cherchent la lumière chez les philosophes, ils avancent mais ils sentent bien les limites de cette philosophie trop humaine, ouvrage d’intelligences humaines, brillantes parfois et limitées tout le temps, alors ils cherchent ailleurs dans la poésie ou la musique,  parfois ils ne savent même pas que c’est Dieu qu’ils cherchent, ils lui donnent tous les noms mais ils cherchent quelque chose qui pourrait combler leur soif, parce qu’il a soif, alors ils cherchent, et quand ils cessent de chercher ils s’arrêtent et épuisés ils désespèrent.

L’homme est un chercheur de Dieu, il avance toujours plus loin comme les mages qui ont longtemps cherchés, une vie à chercher la vérité, une vie de quête, à suivre les signes, à creuser les trésors de la sagesse humaine enfouie dans les bibliothèques pour trouver la lumière.

Et ils ont eu le temps de s’en poser des question Gaspard, Melchior et Balthazar car il est long le chemin qui les a conduit de l’orient lointain jusqu’à Bethléem, ils ont eu le temps de discuter entre eux, de refaire le monde, de s’interroger, de débattre, de méditer. Et j’ai capté une de leurs nombreuses conversations à dos de chameaux :

Balthazar le premier prit la parole « vous savez les gars aussi bien on s’est complètement trompé, on court après une chimère : Dieu n’existe pas ! C’est juste une fabrication humaine, tous nos désirs les plus grands, toutes nos aspirations les plus hautes, c’est ça que nous appelons Dieu, en fait Dieu n’existe que dans nos intelligences, c’est nous qui l’avons fabriqué, il vaut mieux retourner d’où nous venons. » « Oui mais alors Balthazar d’où vient cette soif de vérité en nos intelligences, cette faim de justice en nos cœurs, cette soif de beauté en nos âmes ?  Si Dieu n’existe pas ça veut dire que nous avons trouvé, nous avons la réponse à toutes nos questions ? Qu’on peut s’arrêter et rentrer chez nous ? » « Mais c’est désespérant ce que tu nous proposes Balthazar, parce qu’en arrêtant de chercher nous perdons ce qui nous fait avancer. » Non Balthazar tout en nous aspire à plus, nous sommes fait pour plus grand, pour quelque chose qui nous dépasse, quelqu’un que nous ne pouvons pas fabriquer, quelqu’un que nous ne pouvons qu’accueillir, ton intelligence orgueilleuse voudrait être créatrice de tout et maitresse de tout et l’orgueil le plus haut serait pour elle de se dire qu’elle a crée Dieu, elle refuse de reconnaitre qu’elle est crée par Dieu et pour Dieu, elle refuse de s’agenouiller pour recevoir la lumière, elle veut conquérir, alors que Dieu veut se donner à ceux qui l’accueillent à genoux.

Melchior les interrompt « Oui je suis assez d’accord avec toi Gaspard, je crois que Dieu existe, mais… mais je pense qu’il est inconnaissable » « mais alors qu’est ce que tu fais de toutes les sagesses, de toutes les religions, de tous ces chemins qui depuis des siècles ont conduit les hommes à croire ? » « eh ben justement la multiplicité des religions c’est bien le signe qu’aucune n’est vraie, que toutes détiennent, peut être, une parcelle de vérité je te l’accorde, mais qu’aucune à elle seule ne saurait se dire la vraie religion, ce d’ailleurs serait une marque d’intolérance délirante, je crois que nous devrions essayer de collecter tout ce que les religions ont de meilleurs et en faire une compilation, oui un peu comme les enfoirés vous verrez les gars ça marche, commercialement c’est vendeur  « oui mais là Melchior toi aussi en fait tu tombes dans le pire des relativismes, toi aussi tu te fabriques ton dieu, un dieu qui soit dit en passant n’a aucune chance d’exister ailleurs que dans ton intelligence foisonnante. » « Non je crois que nos intelligences cherchent Dieu et qu’en effet à elles seules elles ne parviendront jamais à le connaitre parfaitement, en fait je crois qu’il faudrait que Dieu se fasse connaitre, qu’il faudrait que Dieu se révèle, il faudrait que Dieu vienne jusqu’à nous, qu’il nous dise la vérité toute entière, qu’il parle notre langage ! » « Eh Melchior, tu arrêtes ton délire, tu imagines un Dieu qui parle !! Et puis quoi encore, pourquoi pas Dieu fait homme ? » « Ouais vous avez raison les gars ce n’est pas bien raisonnable. »

« Et toi Gaspard qu’est ce que tu en penses ? » « Ben moi je pense que finalement peu importe le chemin que tu prennes pour aller vers Dieu ce qui importe c’est d’y aller de tout ton cœur, tu sais : « chacun sa route, chacun son chemin, chacun son rêve, chacun son destin », au bout du compte toutes les religions se valent, non ? » « Enfin elles se valent oui tu as raison, elles se valent tant qu’elles représentent le désir de l’homme de monter vers Dieu, elles se valent parce que chacune exprime quelque chose du mystère insondable de Dieu, elles se valent parce qu’elles possèdent toute une parcelle plus ou moins grande de cette  vérité de Dieu sinon comment les hommes les croiraient ? Elles se valent tant que Dieu n’a pas parlé directement aux hommes….. » Et soudain voilà qu’ils arrivent devant la crèche, « Eh les gars dit balthazar vous entendez… ?» « Non je n’entends rien », « si, tendez mieux l’oreille…  vous entendez ? » « Oui on dirait les pleurs d’un enfant, on dirait la voix d’un nouveau né. »

Non Melchior ce que tu entends c’est Dieu, ce Dieu que tu cherches depuis si longtemps, il est là, déroutant, imprévisible, caché, Dieu petit enfant, Dieu fait homme, Dieu qui parle le langage des hommes, Dieu qui se fait connaitre, Dieu qui veut rassembler les hommes, « de toute race, langue, peuple et nation », dans l’unique corps qui est l’Eglise parce qu’elle est vaste notre Eglise, elle n’est ni d’Europe ni d’Asie, elle n’est ni de droite ni de gauche, elle n’est pas l’Eglise des blancs pas plus qu’elle ne serait l’Eglise des noirs, elle est catholique.

Et l’enfant Dieu les accueille

Et eux comme des hommes libres, libérés de tous leurs doutes, de toutes leur peurs, de toutes leurs tergiversations ils s’agenouillent

Et eux comme des hommes riches, riches de leur foi, riches du chemin parcourus ils donnent l’or, l’encens et la myrrhe, ils donnent tous ce qu’ils ont

Et eux comme des fils, heureux, ils reçoivent et ils accueillent le Fils Unique qui leur donne tout, tout ce qu’il est,

ils l’accueillent car il est l’unique chemin,

ils l’accueillent car il est la vérité toute entière,

ils l’accueillent car il est la vie en plénitude.

Amen

Abbé Simon d’Artigue