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Edito de mai : « Allons ! de toutes les nations faisons des disciples. »

« Aimez-vous les uns les autres. Faites ceci en mémoire de moi. Qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. Veillez et priez. Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent. Ne jugez pas et vous ne serez pas jugé. »

Jésus a laissé peu de commandements à ses disciples et quand nous en trouvons un dans l’Evangile, nous sentons bien qu’il s’agit là de quelque chose de précieux, une parole qui touche au coeur de notre foi. Quand nous entendons « aimez-vous les uns les autres « , nous savons que nous ne pouvons pas nous dérober, qu’il en va de notre identité de disciples du Christ.

Jésus ne nous adresse pas tant de commandements que cela, il est rarement impératif. Souvent, il conseille, il indique, il oriente ; mais quand il manifeste son autorité, il nous faut tendre l’oreille. Or, j’ai remarqué que, parmi ces commandements du Christ, il en est un qui soulève presque toujours une réticence, une résistance, une incompréhension, une gêne : c’est cet ultime commandement, la finale de l’évangile selon Saint Matthieu « Allez ! De toutes les nations faites des disciples.  » Mt 28.19

Pourquoi résistons-nous à ce verset ?

Il y a, pêle-mêle, la peur de tomber sous le coup d’un prosélytisme de mauvaise aloi, la crainte d’imposer ce que nous croyons à ceux qui n’en ont rien à faire, l’idée que ce ne serait pas la bonne « stratégie » pour annoncer la bonne nouvelle, l’échec du « refaisons chrétiens nos frères » de l’action catholique, la mauvaise conscience colonialiste, la confusion entre évangélisation de rue (qui est un mode d’évangélisation) et évangélisation. En fait, je crois que nous avons chacun notre résistance, notre frein à aller faire des disciples, à répondre au commandement de Jésus.

Or, tous, nous avons été évangélisés ! C’est donc qu’il y a quelqu’un qui nous a transmis la parole du Christ, parce que cette parole était importante pour lui, parce que cette parole était brûlante pour lui et qu’il fallait qu’il la partage : « Notre coeur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? » Lc 24.32

 

Or, de quoi s’agit-il quand Jésus nous donne ce dernier commandement ?

Il s’agit de faire des disciples. Jésus ne parle pas de la manière de les faire mais simplement de notre intention, que, là où nous sommes, nous cherchions à faire des disciples, à transmettre ce que nous avons nous-mêmes reçu et qui a changé notre vie (ou plutôt devrais-je dire qui change notre vie, car cette évangélisation de nos coeurs est une oeuvre permanente). C’est cette Eglise en sortie dont le pape François ne cesse de nous parler ; et il ne s’agit pas, me semble-t-il, de viser d’abord à la croissance numérique de l’Eglise mais de répondre à l’appel du Christ.

Outre le fait que c’est la nature même de l’Eglise que d’être missionnaire (Ad Gentes 2), j’y vois un bénéfice immédiat pour notre communauté : s’intéresser à ceux qui sont au dehors, à ceux qui s’en moquent, à ceux qui frappent à la porte pourrait nous éviter de trop nous occuper de nos petits problèmes internes, de notre organisation, de nos oeuvres, de ce que nous avons toujours fait (et parfois le « toujours » à quelques mois), ce risque de sclérose qui nous guette quand l’Eglise est autocentrée.

Alors, peu importe la manière dont chacun de nous répondra à ce commandement du Christ, peu importe la manière dont chacun vivra cette mission, ce commandement est absolument vital pour nous et pour notre Eglise, pas d’abord pour qu’elle grandisse mais pour qu’elle vive et nous avec.

Allons ! de toutes les nations faisons des disciples.

Abbé Simon d’Artigue