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L’Innocent bafoué – Homélie des rameaux 2019

Il y a plusieurs semaines que j’aurais dû écrire cette homélie, j’ai bien essayé à plusieurs reprises mais les mots ne sortaient pas, trop de colère, trop de honte, la peur de fondre en larmes…

Mais aujourd’hui, c’est l’Innocent qui est mis en croix et je ne peux pas me dérober à la croix, à me tenir devant la croix.

C’est l’Innocent, celui qui est sans péché qu’on a bafoué.

Et les premiers à l’avoir fait, ce ne sont pas les juifs ou les romains, les premiers à le crucifier ce sont ses proches, ses disciples, ses apôtres : Pierre qui renie et Judas qui trahit.

Cette histoire semble avoir 2000 ans, un événement lointain qui a peu à voir avec nous, avec moi, et pourtant…

Aujourd’hui encore, comme le Christ, des innocents ont été bafoués, humiliés, profanés par des disciples de Jésus Christ, ceux que le Christ Jésus avait choisis pour être ses prêtres, ses proches, les serviteurs de son peuple ; comme Pierre, comme Judas, ils ont trahis. 

Nous avons envie de les juger et il faut qu’il le soient, mais pas par nous – car nous sommes injustes – par la justice, celle qui a autorité.

Nous avons envie de les juger alors qu’aujourd’hui seul deux choses comptent :

  • regarder les victimes, regarder la victime, les écouter, leur demander pardon et rester avec elles « Car tout ce que vous avez fait à l’un de ses petits qui sont mes frères c’est à moi que vous l’avez fait »
  • Et nous convertir, c’est à dire changer ce qui doit l’être :
    • dans mon comportement personnel d’abord. C’est sainte mère Teresa qu’un journaliste interrogeait sur ce qu’on devait changer pour abolir le mal dans le monde et elle répondait : « vous… et moi »,. 
    • changer ce qui doit l’être dans nos relations, 
    • changer ce qui doit l’être dans notre Eglise : ne pas fermer nos yeux coupables sur le scandale et la misère, car ce serait fermer les yeux sur le Christ en croix.

Nous convertir c’est choisir de n’être pas Judas qui trahit par un baiser, de n’être pas Pierre qui renie par trois fois, 

Mais d’être Pierre qui pleure et  demande pardon, 

Mais d’être Simon de Cyrène qui accompagne l’innocent chargé de sa croix, qui reste avec lui, 

Mais d’être Marie debout au pied de la croix.

Choisir Judas, c’est choisir de pleurer de désespoir, ce désespoir stérile qui ne change rien et conduit à la mort.

Choisir Simon de Cyrène, c’est choisir la croix et être auprès des victimes.

Choisir Pierre, c’est choisir de pleurer de douleur et d’entrer dans l’épreuve, celle qui nous transforme, nous convertit pour ressusciter avec la grâce de Dieu.

 

Abbé Simon d’Artigue