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La foi et un pas – Homélie du 2ème dimanche de carême (A)

La foi et un pas – Homélie du 2ème dimanche de carême (A)

Il était tranquille Abraham, il avait femme et enfant, chef de tribu, il avait plutôt bien réussi dans la vie, installé, ses plans s’étaient déroulés sans accrocs, il n’avait besoin de rien, jusqu’à ce que

Ils étaient tranquilles Pierre, Jacques et Jean au bord du lac de Galilée, ils avaient leur petite entreprise familiale de pêche, la vie se déroulait tranquillement, jusqu’à ce que

Il était tranquille Paul, pharisien fils de pharisien, éduqué à l’école des plus grands, une belle carrière de persécuteur s’ouvrait devant lui, jusqu’à ce que

Et nous, bien souvent nous aspirons aussi à une vie tranquille, une vie planifiée, où nous maitrisons tout et notre bonheur semble être dans cette maitrise, dans cette prévision. On fait tous des plans. On veut tous maitriser notre vie, savoir ce qu’on va devenir, jusqu’à ce que

 

Jusqu’à ce que Dieu intervienne :

« Le Seigneur dit à Abraham quitte ton pays »

« Le Seigneur nous a appelé à une vocation sainte »

« Jésus prit avec Lui Pierre, Jacques et Jean et il les emmena »

jusqu’à ce que Dieu intervienne dans notre vie.

Parce que Dieu intervient dans notre vie, bien sûr ! Parfois, on réduit notre foi à n’être qu’une pratique religieuse, un conformisme et on finit par oublier que notre foi est avant tout, j’allais dire exclusivement, une relation à Dieu qui intervient dans l’histoire et dans ma vie. Dieu qui vient changer ma vie, exactement comme il a changé la vie d’Abraham, de Pierre ou de Paul. Chacun d’eux aurait pu en rester à sa vie d’avant ; ils avaient même pas mal de raisons de ne pas se jeter dans l’aventure folle de l’écoute de Dieu, de la confiance en Dieu. Oui mais voilà, ils ont écouté et ils se sont mis en route, ils ont plus fait confiance à Dieu qui les appelait qu’à leur confort qui les tenait et les retenait.

Jusque-là, ils maîtrisaient assez bien leur vie et elle leur convenait, mais Dieu, notre Dieu, veut plus pour nous que le confort. Notre Dieu aime à nous déstabiliser, alors il nous appelle. « Viens et suis-moi » dit-il à Abraham, Paul ou Pierre, « viens et suis-moi » dit-il à chacun d’entre nous.

La foi et un pas

« Et, dit saint Jean Chrysostome, Abraham partit sans savoir où il allait et c’est parce qu’il ne savait pas où il allait qu’il savait qu’il était dans la vérité. »

La foi et un pas

Dieu s’y prend toujours ainsi avec nous, il nous demande rarement de grandes choses. Il nous demande de faire un pas en avant et de lui faire confiance : la foi et un pas ; c’est saint Paul qui dit que « Dieu nous a appelé à une vocation sainte » et nous, nous tremblons de nous savoir appelé à une chose aussi grande que la sainteté. Du coup, nous tremblons, nous hésitons et nous nous recroquevillons, mais ça c’est la traduction de saint Paul, de Paul le fougueux, de Paul l’apôtre ardent. Dieu, lui, connait notre faiblesse, il connait nos peurs aussi alors il nous propose, comme à Abraham, de lui faire confiance et de faire un pas.

La foi et un pas

Et Jésus nous connait, il connait nos failles et nos fragilités, alors il nous propose comme à Pierre, Jacques et Jean de faire un pas : « viens et suis-moi ». Il ne leur présente pas d’abord la sainteté, la croix et la gloire du Thabor : il leur demande seulement de faire un pas, de marcher à sa suite et nous le savons tous que, faire un pas, c’est se mettre en déséquilibre et c’est comme ça que nous avançons. Alors Dieu nous appelle : suis-moi, ne cherche pas à tout maitriser de ta vie, ne cherche pas à tout contrôler, à tout prévoir et planifier, laisse-moi être le maitre de ta vie, fais-moi confiance, aie foi en moi, je ne te demande rien de plus : la foi et un pas.

 

Et nous nous lui posons mille questions, des questions qui nous permettent de nous rassurer, de reprendre le contrôle sur nos vies et alors nous empêchons Dieu d’agir pleinement.

Et lui, toujours patiemment, nous redemande : la foi et un pas, est-ce que tu me fais confiance ?

Est-ce que tu me fais confiance quand je te dis d’attendre ?

Est-ce que tu me fais confiance quand je te demande de pardonner ?

Est-ce que tu me fais confiance quand je t’invite à me suivre ?

La foi et un pas

Et Abraham de répondre : Oui Seigneur, je te fais confiance mais est-ce que tu vas m’accompagner jusqu’au bout, jusqu’à ce pays que tu m’as promis ?

Et Pierre de répondre : oui Seigneur, je te fais confiance mais je garde mon épée au cas où on en ait besoin, on ne sait jamais s’il fallait te défendre ?

Et Paul de répondre : oui Seigneur, je te fais confiance mais débarrasse-moi de ce lourdaud de Pierre qui m’empêche d’annoncer ton évangile aux nations…

Et moi de répondre : oui Seigneur je te fais confiance mais….

Mais… nous avons tous nos « oui mais », nos « mais » qui nous tiennent, nos « mais » qui nous empêchent, qui nous enferment dans nos étroitesses. Et Dieu ne se lasse pas d’appeler : « quitte ton pays », « viens suis-moi » « Je suis Jésus que tu persécutes. »

La foi et un pas

Aujourd’hui encore Dieu appelle, en s’adressant directement au cœur de certains, mais sa manière habituelle d’appeler, d’entrainer, c’est par son Église, c’est par vos pasteurs, c’est par vos frères que Dieu vous appelle et vous entraine à la grande aventure de le suivre : la foi et un pas.

De le suivre comme Abraham : sans bien savoir à quoi ressemble la terre promise, mais peu importe la terre promise ce que nous voulons, c’est lui faire confiance.

De le suivre comme Paul : sans bien savoir la mission, mais peu importe la mission ce que nous voulons, c’est « écouter le fils bien aimé »

De le suivre comme Pierre, Jacques et Jean : sans bien savoir où cela nous mènera, mais peu importe où nous allons ce que nous voulons, c’est être « avec lui ».

 

Abbé Simon d’Artigue