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Homélie – Fête de la Nativité de la Vierge Marie

Homélie – Fête de la Nativité de la Vierge Marie

Homélie pour la fête de la Nativité de la Vierge Marie – Notre Dame la Dalbade – 8 septembre 2018

 

La fête que nous célébrons en ce jour est issue de traditions venues du christianisme oriental des premiers siècles, relatives aux parents de la Vierge, Anne et Joachim, à sa naissance et à son enfance.

C’est au 5° siècle qu’une église fût consacrée en l’honneur de la nativité de la Vierge à Jérusalem un 8 septembre, non loin de la piscine probatique, à proximité de l’endroit indiqué par la tradition locale comme étant celui de la maison natale de la sainte Vierge. La fête de l’Immaculée conception sera tout logiquement située 9 mois avant, c’est-à-dire le 8 décembre .

Mais pourquoi attribuer une telle importance à cette naissance ? Comme toutes les fêtes mariales, celle de la nativité de la sainte Vierge est orientée vers le Christ et est destinée à nous faire entrer dans la connaissance du mystère du Christ, Fils unique du Père, Créateur et Sauveur de l’humanité.

C’est ainsi que la naissance de Marie nous renvoie à la création de l’homme et au mystère du salut.

On peut dire qu’avec la naissance de Marie, peut enfin commencer une création humaine réussie ! la première création telle que la présente le récit du péché originel au chapitre 3 de la genèse se termine sur l’état actuel de la condition humaine, marquée par la séparation d’avec Dieu manifestée par la condition mortelle, la souffrance, la convoitise et la division. Mais aussi , et surtout , ce sombre tableau des origines se conclut sur une annonce de salut, avec la promesse de Dieu inclue dans la malédiction du serpent et annonçant que la descendance de la femme lui écraserait la tête.

C’est le début de ce processus que nous célébrons aujourd’hui avec la naissance de Marie. Elle est la nouvelle Eve, changeant, dans la récitation de la salutation angélique Eva en Ave. (dans la prière : »Ave Maris stelle » se trouve la phrase qui fait allusion à cette inversion des lettres : « mutans Evae nomen=changeant, « retournant » le nom d’Eve.) En effet, là où Eve (sans minimiser la responsabilité également partagée d’Adam) cède à la séduction du discours trompeur du diable et donne naissance à une humanité déchue du projet initial de Dieu décrit dans la situation heureuse de l’harmonie du jardin d’Eden, Marie, préservée du péché originel par une grâce venant déjà de la mort de son Fils (oraison d’entrée de la messe de l’Immaculée Conception), est la première créature humaine définitivement réussie. Elle est, dès sa conception, en harmonie parfaite  et en totale adhésion avec la volonté de Dieu et pourra, du fait de cette transparence, accueillir au cœur de sa personne chair, âme et esprit, la parole de Dieu, la deuxième personne de la sainte Trinité, le Verbe de Dieu dont elle engendrera l’humanité. Elle est la première humaine complètement réussie, rendue capable par la grâce salvatrice de Dieu de donner naissance selon la condition humaine à la personne divine du Verbe incarné. C’est pour cette raison qu’on lui reconnaîtra au concile d’Ephèse en 431 le titre de Mère de Dieu . Elle est l’heureuse porte du ciel « felix caeli porta » par laquelle le Verbe Créateur de Dieu pourra venir réparer toute l’humanité. Par l’accueil de Marie, Celui-ci, nouvel Adam, pourra en pleine pâte humaine, au cœur d’un humanité séparée de son Créateur et divisée entre ses membres, renouer avec Dieu et entre les enfants de la famille humaine, les liens rompus par le péché, , le péché des origines et tous les péchés concrets, tous nos péchés. Une nouvelle solidarité pourra voir le jour. A partir de la nouvelle Eve, Marie et du nouvel Adam, son Fils Jésus, une nouvelle humanité rachetée, restaurée, réparée, pourra enfin advenir. Le combat pour inverser la solidarité dans le mal pourra se dérouler en toute confiance, car il est assuré de la victoire par la Résurrection du Christ. Pourra se construire alors la nouvelle solidarité dans l’accueil actif du salut inaugurée par la naissance de Marie et disparaître, au gré de l’accueil de la grâce par l’humanité, la solidarité dans le mal. Cela vaut bien une fête !

Dès le début le salut est à l’œuvre et l’ensemble de la révélation biblique se présente comme cette lente rééducation des rapports humains et l’éradication progressive de la violence et du mal.

La généalogie de Jésus, idéalement présentée en 3 fois 14 générations contient déjà, au nombre des très nombreuses « femmes de la Bible » dont Marie « comblée de grâce », viendra couronner d’éminente façon le rôle positif et majeur des femmes dans l’histoire de la Révélation divine  4 femmes, ancêtres du Messie. Pourtant marquées par des handicaps moraux ou ethniques, elles viennent déjà illustrer la capacité de la grâce d’intervenir déjà dans l’humanité en lente rééducation, dès les origines. Thamar sera amenée à s’unir à son beau-père Juda fils de Jacob qui refusait au terme de la loi juive du lévirat de lui donner en mariage son second fils après le décès de son frère (Genése chapitre 37). Rahab est une prostituée de Jéricho (livre de Josué, chapitre 2, chapître 6, 22-26). Ruth est une moabite, étrangère ethniquement au peuple d’Israël (livre de Ruth) et Bethsabée, la femme d’Urie le Hittite, mère du Roi Salomon, sera entraînée à l’adultère par la convoitise de David ( 2° livre de Samuel, chapitres 11 et 12) ! De belles grands-mères pour le Messie ! ( mais voyez au passage la responsabilité masculine dans le statu peu édifiant de ces femmes).

Cela nous montre que dans l’incarnation, Dieu n’a pas hésité à se « salir les mains » pour nous purifier.; Il le peut parce qu’il est Saint et que rien ne peut le souiller, le contaminer, résister à sa force purificatrice, créatrice et recréatrice.

En fin de la généalogie ancestrale, vient l’engendrement de Jésus. Sa naissance et la possibilité de sa mission de salut va être permise par un homme, qui n’est pour rien dans l’engendrement physique, Joseph. Si celui-ci avait répudié publiquement sa femme enceinte comme le lui permettait la loi de Moïse, Jésus n’aurait pas pu naître car Marie enceinte aurait été lapidée. Et s’il l’avait renvoyée en secret, l’opprobre d’une naissance illicite aurait marqué le fils de Marie et l’aurait empêché socialement d’accomplir sa mission. L’humanité doit donc aussi toute sa reconnaissance à saint Joseph.

Notre confiance en la Vierge Marie est motivée par son rôle éminent dans l’histoire du Salut, mais aussi par sa proximité avec nous dans les épreuves. L’étonnante aventure de l’incarnation, avec toutes les questions et les frayeurs qu’elle a du entrainer dans la conscience de cette jeune fille. Le comportement étrange de ce fils, perdu et retrouvé au temple, dont elle sent progressivement que sa prédication est dangereuse pour sa sécurité et sa vie. La mort du fils unique sur le calvaire, au rang des malfaiteurs. Le veuvage aussi.

Voilà ce qui motive notre prière confiante à celle qui se définit comme l’humble servante, bienheureuse parce qu’elle a cru, en qui et par qui Dieu a fait et continue de faire des merveilles.

Sainte marie Mère de Dieu , priez pour nous pauvres pécheurs maintenant et à l’heure de notre mort, Amen.