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Des fraternités missionnaires… homélie

Des fraternités missionnaires… homélie

Imaginez, oui je dis bien imaginez (une chose qui n’a donc rien à voir avec la réalité) imaginez  un touriste qui entre dans une église en plein milieu de la messe, il en fait le tour pendant que le prêtre prêche avec brio et que les chrétiens prient avec ferveur, il déambule le nez en l’air contemplant les voutes, les tableaux, les vitraux  et 10 mn plus tard, il en ressort comme si rien ne s’était passé. Il aura fait le tour des jacobins comme si nous étions invisibles, ce qui l’a touché ? C’est le palmier des jacobins, la beauté des vitraux, la chaleur de la brique, le silence majestueux des lieux, mais pas nous, nous nous étions comme invisibles, nous ne l’avons pas interpellé, notre présence n’a rien changé à sa visite, mais pire elle n’a rien changé à sa vie.

C’est ce à quoi ressemble notre Eglise aujourd’hui en France à Toulouse, transparente, insignifiante, au mieux un monument historique, un monument qui fait partie de l’histoire de France, de l’histoire passée, au pire un objet de scandale.

Alors bien sur, nous y faisons de belles et bonnes choses dans notre église, dans notre paroisse, nous nous réunissons, nous catéchisons, nous allons à la messe et tant d’autres choses. Mais est-ce que cela change notre vie ? Est-ce que cela change la vie  de nos contemporains ?

Je parle de  notre touriste de tout à l’heure, celui qui a fait le tour de l’église le nez en l’air, celui que nous n’avons pas accueilli (pas su, pas pu accueillir), oui mais, vous me direz c’est compliqué d’accueillir quelqu’un à la messe et puis il n’est pas venu pour ça et puis ce n’est pas le lieu.

Alors mes frères, allons nous continuer a célébrer la messe comme ça chaque dimanche entre nous, tranquillement en espérant que des personnes s’agrègent à notre communauté ? Un peu par miracle, un peu par coup de bol, un peu par hasard et ça arrive ? Regardez saint Paul, action directe de Dieu; allons nous continuer à préparer au baptême, au mariage ceux qui se présentent et les laisser repartir sans rien leur proposer d’autres ? Allons nous continuer à fleurir, à chanter, à catéchiser et voir partir les enfants à peine la première bouchée avalée ?

Bien sur que non, aucun de nous ne le veut, c’est même un motif de découragement pour ceux d’entre nous qui se donnent si généreusement dans ces services. Alors, comment permettre à toutes ces personnes de nous rejoindre, de se joindre à nous lors des messes chaque dimanche à la Dalbade, à la Daurade, à Saint Aubin, à la cathédrale ? Car c’est là, à la messe que bat le cœur de notre communauté.

Mais comment se fait cette agrégation habituellement ?

Elle se fait de deux manières me semble t il : Par la fraternité et par la mission.

La fraternité, L’accueil fraternel, d’abord entre nous, c’est pour ça que nous avons pris 30 secondes au début de cette messe pour nous saluer. Parce que, bien souvent nous sommes de parfaits inconnus les uns pour les autres, nous pouvons passer une année entière sur le même banc sans nous adresser la parole, et nous osons encore nous appeler frères ? C’est pour cela que nous prendrons une demi-heure après la messe pour discuter ensemble dans le cloitre des jacobins, un verre à la main parce que nous sommes frères. Sans cette fraternité, voulue, vécue, entretenue, il n’y a pas d’Eglise. Mais en fait, je crois que le dimanche à la messe nous somme trop nombreux pour vivre cette fraternité. Pour vivre en frère nous avons besoin d’être moins nombreux, de nous connaitre, de savoir ce que nous vivons dans la semaine, nos joies, nos peines. Or nous ne pouvons pas connaitre 800 personnes, pour vivre la fraternité il faut être un petit nombre, un petit groupe de frères.  

 

L’agrégation se fait donc par la fraternité et la fraternité est première, mais elle se fait aussi par la mission aller rencontrer celui qui est au loin, aller le rencontrer pour l’inviter à faire cette rencontre qui change tout dans une vie, la rencontre du Christ, Celui qui vous a touché, Celui pour qui vous êtes là ce matin, Celui que vous aimez, que vous priez, que vous servez : Jésus Christ. La mission qui est la raison d’être de l’Eglise, Jésus a fondé l’Eglise pour qu’elle continue d’annoncer la bonne nouvelle et quand l’Eglise fait autre chose que cela elle n’est plus l’Eglise.

Et je me dis bien souvent que la mission doit être le critère ultime de toute nos propositions pastorales, est-ce que je suis là pour annoncer Jésus christ ? Est-ce que le but de mon groupe de catéchisme, de mon aumônerie, de mon groupe biblique, de mon équipe du mouvement chrétien des retraités, de mon équipe d’ACI est d’annoncer le Christ ? Si ce n’est pas le cas, si nous le perdons de vue, nous prenons le risque de tourner en rond, de péricliter et nous en connaissons tous de ces groupes qui ont plaisir à se retrouver entre soi, entre amis, mais l’entre soi est mortel ! Nous sommes faits pour la mission.  

Quand nous l’oublions, quand nous négligeons la mission nous risquons de tomber dans les querelles intestines, mesquines, mortelles pour nous, mais plus encore pour notre communauté, notre église.  La mission nous ouvre, elle nous dilate le cœur, elle nous met en danger, elle nous sauve du confort.

Mais mon père ? C’est ce que nous vivons déjà, toute notre communauté est déjà si fraternelle et si missionnaire nous n’avons besoin de rien de plus !

C’est vrai. Mais alors je vous propose de vérifier que ce groupe auquel vous appartenez est fraternel et missionnaire, vous posez simplement ces deux questions : Comment est-il fraternel ? Comment est-il missionnaire ?

 

Vérifier que dans chacun des groupes de la paroisse déjà existants nous vivions la fraternité et la mission, pourquoi les deux parce qu’avec la fraternité sans la mission nous virons rapidement à un groupe d’amis dont bien souvent le Christ ne sera pas au cœur. La mission c’est cette ouverture à celui qui est au dehors, à celui que je ne connais pas, à celui que j’invite, celui qui me dérange mais qui en même temps me tient en éveil, évite que je m’habitue.

Mais la mission sans la fraternité c’est vain, c’est du prosélytisme, du chiffre, en effet j’annonce le Christ dans la mission. oui mais, où est ce que je le rencontre ? La fraternité c’est ce lieu où je peux rencontrer concrètement le Christ dans mes frères en partageant ma foi, en nous aidant les uns les autres à « grandir dans l’amour du Christ. »

 

Alors je vous propose pendant ce temps de l’avent, (4 semaines, c’est court quatre semaines), je vous propose de constituer des petites fraternités de 6 à 10 membres maximum, afin que nous apprenions à nous connaitre mieux. C’est important de connaitre le prénom de mon frère. Pour vous retrouver une fois par semaine pour 1h, 1h30 maximum, pas pour boire un verre, pas pour faire une belote, non juste pour partager ensemble sur la Parole de Dieu, l’évangile du dimanche suivant, pour prier les uns pour les autres, pour partager sur ce que Dieu a fait dans notre vie cette semaine et sur ce que j’ai fait pour Dieu, pour vivre un temps fraternel. Rien d’extraordinaire en somme, oui mais, Dieu peut faire des choses extraordinaires au milieu de cet ordinaire que nous lui offrons, au milieu de nos semaines souvent surchargées. Parce que oui mon père, vous ne vous rendez pas compte de tout ce que nous avons déjà, si on se rajoute quelque chose on va exploser ! Une chose de plus ! C’est vrai une chose de plus, mais une chose absolument essentielle en fait, nous recentrer ensemble sur Jésus Christ. Peut être faudra-t-il abandonner d’autres choses ? Peut être faudra-t-il faire moins de chose pour être plus, pour vivre plus intensément, pour partager en frères et nourrir notre vie spirituelle, sinon tout le reste n’a aucun sens. Rien ne sert de catéchiser, de chanter, de servir si ce n’est pas nourri par notre union à Jésus et parfois,  je dois vous l’avouer notre paroisse risque plus de ressembler à une entreprise à faire tourner qu’à une communauté de frères à aimer (et j’en suis le premier responsable) peut-être que ce temps de l’avent est le bon temps pour simplifier notre vie, à l’image de la simplicité de la crèche, pour nous recentrer sur l’essentiel, l’unique nécessaire, le Christ et sa Parole.

 

Des fraternités d’accord, mais alors en quoi ces fraternités seront elles missionnaires ? Elles le seront à une seule condition, que nos cœurs soient ouverts et que vous y invitiez une ou deux personnes dont vous savez qu’elles ne viennent pas à la messe (parce que la messe c’est trop triste, c’est pas accueillant, je n’y comprends rien…) elles ne viennent pas ou plus à la messe  mais qu’elles en sont proches, une famille du catéchisme, une amie de l’école, un voisin, nous avons tous dans notre entourage une de ces personnes à qui nous pourrions proposer cela (prenez 2mn à la fin de cette homélie pour réfléchir à cette personne, priez pour elle, cette personne, que vous pourriez inviter) cet ami à qui nous pourrions proposer non pas de nous rejoindre directement à la messe, car à la messe il y a le risque énorme qu’il ne soit pas accueilli, mais dans notre fraternité, à la maison, dans un groupe à taille humaine.

Se retrouver 4 fois, comme un chemin vers Noël.

S’entraider à grandir dans cet amour du Christ.

Et peut-être, que cette porte ouverte dans nos cœurs permettra au Saint Esprit d’agir dans nos vies,

Peut-être que la parole de Dieu plus tranchante qu’un glaive, et plus douce comme le miel, fera son œuvre.

Peut-être, que ce que, ce que nous aurons vécu ensemble nous donnera le gout d’aller plus avant et de poursuivre cette expérience

peut être que nous aurons gouté quelque chose de neuf, quelque chose de simple, ce cadeau que Dieu fait à ses fils : la force de la fraternité et la joie de la mission.

 

Abbé Simon d’Artigue